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Straw : lecture psychopathologique d’un deuil traumatique

Straw Film Netflix 2025

Nous tous, on a vu le nouveau film de Tyler PerryStraw, avec l’incroyable Taraji P. Henson en tête d’affiche. Les hypersensibles comme moi ont pleuré yakooo à nous.

Mais au-delà du jeu d’acteur, au-delà de l’émotion, il y a une réalité psychologique forte qu’on ne peut pas ignorer. Bref, c’est une masterclass sur le sujet pour moi, le réalisateur m’a fait réviser mes cours.

Ce film parle du deuil, mais pas d’un deuil normal.

Il parle d’un effondrement psychique silencieux, d’un cerveau qui lâche, d’une âme qui ne peut pas encaisser.

Tout d’abord, c’est quoi le deuil ?

Le deuil est un processus psychique complexe qui se met en place après une perte majeure, généralement la mort d’un être cher.

Les 5 étapes du deuil (selon Kübler-Ross) :

  1. Le déni : “Non, ce n’est pas vrai.”
  2. La colère : “Pourquoi moi ? Pourquoi elle ?”
  3. Le marchandage : “Et si j’avais été là ? Si on avait agi plus tôt ?”
  4. La dépression : “Je ne m’en sortirai jamais.”
  5. L’acceptation : “Je vis avec cette absence, mais je continue.”

Ces étapes ne sont pas linéaires. On peut rester bloqué, passer de l’une à l’autre, ou même en vivre plusieurs en même temps.

Parlons du film Straw

Dans Straw, le personnage principal perd sa fille, atteinte d’asthme, qui décède brutalement à l’hôpital, la veille.

Mais le lendemain matin, elle se lève, prépare sa fille pour l’école, parle avec elle, cherche de l’argent pour elle, l’amène… comme si elle était encore vivante.

Ce n’est qu’à la fin du film qu’on comprend que l’enfant est déjà morte.

Et là, tout prend sens : ce qu’on voyait n’était pas un souvenir. Ce n’était pas un rêve.

C’était un effondrement dissociatif, un refus total du réel, une construction mentale de survie.

Analyse psychopathologique

Selon le DSM-5, il ne s’agit pas du processus d’un simple deuil normal.

On peut évoquer ici un trouble stress aigu avec dissociation, combiné à un épisode délirant bref à thématique de deuil.

1. Un état dissociatif post-traumatique :

Le cerveau “déconnecte” une partie de la réalité pour protéger la personne du choc.

C’est comme un court-circuit dans le cerveau ; il ne supporte pas la douleur et se coupe de la réalité.

Elle agit “normalement”, mais dans un monde intérieur parallèle.

C’est un refus inconscient, total, de la mort.

2. Un délire affectif de deuil :

C’est un délire, centré sur la perte d’un enfant.

Il est un état psychotique transitoire, mais intense.

La personne est convaincue que l’être perdu est toujours vivant, construit une logique interne cohérente, mais déconnectée de la réalité.

Dans le film, elle s’est levée le matin et a donné le bain à sa fille, l’a accompagnée à l’école tout en souriant, même quand elle a reçu l’appel lui rappelant ses factures au bureau.

Elle s’est dit que c’était l’école de sa fille qui la contactait, au point de s’y rendre jusqu’à croire qu’on lui a retiré la garde de sa fille.

Elle a eu des hallucinations auditives, visuelles, qui étaient ancrées dans sa réalité.

3. Le point de rupture :

C’est l’appel de sa mère, à la banque, qui brise le déni.

Un élément externe de vérité, irréfutable, fait irruption dans son état dissociatif post-traumatique.

Elle ne peut plus fuir.

Et là, pfff bimmmm tout s’effondre, la réalité la gifle.

Ce que ce film nous enseigne :

Le deuil peut aller bien au-delà des larmes.

Il peut fracturer la perception, dérégler le comportement, altérer la conscience.

Et chez certaines personnes, il peut générer un effondrement mental temporaire, voire une urgence psychiatrique.

C’est pour cela qu’il est ESSENTIEL de :

  • Ne jamais juger les réactions d’une personne endeuillée
  • Comprendre que certaines personnes survivent en niant, pas en pleurant
  • Proposer un accompagnement psychologique adapté
  • Être présent sans forcer, et écouter sans corriger

Que Dieu soutienne tous ceux qui ont perdu un être cher.

Le deuil est un tunnel. Parfois, on y marche seul, en silence.

Mais personne ne devrait avoir à y rester bloqué.

Si tu es en deuil, sache qu’il est possible de se faire accompagner.

Entoure-toi. Tu ne dois pas traverser ça seul.

Beaucoup de courage à ceux qui traversent un moment de deuil.

Auteure : Dr Gilles Hyacinthe Ninkam

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